Essai - 494p
L'année 1962 est à la fois la fin de la guerre et la dificile transition vers la paix. Concluant la longue colonisation française marquée par une combinaison rare de violence et d'acculturation, elle voit l'émergence d'un État algérien d'abord soucieux d'assurer sa propre stabilité et la survie de sa population. En Algérie, l'historiographie de l'année 1962 se réduit pour l'essentiel à la crise politique du FLN et aux luttes fratricides qui l'ont accompagnée. Mais on connaît encore très mal l'expérience des habitants du pays. D'où l'importance de ce livre, qui entend restituer la façon dont la période a été vécue par cette majorité.
L'année 1962 est scandée par trois moments : cessez-le-feu d'Évian du 19 mars, Indépendance de juillet, proclamation de la République algérienne le 25 septembre. L'histoire politique qu'ils dessinent cache des expériences vécues, que restitue finement Malika Rahal au fil d'une enquête captivante, mobilisant témoignages, autobiographies, photographies et films, chansons et poèmes. Émerge ainsi une histoire populaire largement absente des approches classiques : elle relate le retour de 300 000 réfugiés algériens de Tunisie et du Maroc tout en décrivant le désespoir des Français d'Algérie dont le monde s'effondre, elle raconte la libération des prisons ainsi que celle des camps de concentration où était détenu un quart de la population colonisée, et retrace la démobilisation et la reconversion de l'Armée de libération nationale, la recherche des morts et disparus par leurs proches, l'occupation des logements et terres laissés par ceux qui ont fui le pays ou encore les spectaculaires festivités populaires.
Une fresque sans équivalent, de bout en bout passionnante : un ouvrage qui fera date.