Essai - 13 x 21 - 208p
« Ce livre vient d’un long silence » écrit Ghania Mouffok dans sa préface.
Eveline Safir Lavalette, moudjahida d’origine européenne, ayant fait le choix, très tôt, et évident pour elle, d’être Algérienne au point d’en payer le prix fort (arrêtée en novembre 1956, elle est condamnée à trois ans de prison, torturée, abusivement internée dans un service psychiatrique aura attendu l’âge de 86 ans pour enfin publier ces textes que l’on reçoit comme un don.
Dans un registre tout à fait inédit, entre poème en prose, réminiscence, évocation, chronique des petits riens, son écriture reste inclassable. Ici, nul désir de rédiger des mémoires, de verser dans l’autobiographie, nul souci d’exhaustivité – tout est dans l’ellipse, le rythme, le mot juste et sobre. Le lecteur devra se « contenter » de bribes, de fragments, de sensations : l’enfance à Rouiba, le militantisme scout, l’engagement auprès du FLN ensuite, la prison – souvenirs glaçants, lumineux pourtant, aériens presque –, l’indépendance, Benchicao dans les années quatre-vingt-dix, l’exil, le retour à Médéa enfin.
L’auteur tisse les mots de ses textes comme elle a tissé la tissure de sa vie, avec courage, gravité, intégrité, mais aussi un humour, une fraîcheur et une fantaisie qui sont sa marque.
On en vient alors à se poser la question : cette forme qu’Eveline Safir a choisie – cette vision poétique, cet « ailleurs » –, ne serait-elle pas la forme la plus éloquente, la plus puissante, et peut-être la plus « vraie », du témoignage ?