Essai - 520p
L'apport de l'UDMA (Union démocratique du Manifeste algérien) au mouvement nationaliste a toujours été minimisé par l'histoire dominante. Le parti n'aurait été qu'un "rassemblement" - cristallisé autour de la figure charismatique de Ferhat Abbas - de notables, laïcs, francophones, sourds à "la mystique de la rupture", ayant échoué à conduire pacifiquement l'Algérie à l'indépendance. Autant de préjugés que, dans ce livre exhaustif, l'historienne Malika Rahal démonte avec rigueur.
Elle y retrace ses dix ans d'existence (1946-1956), en décrit la culture politique spécifique, et étudie les références historiques, philosophiques ou religieuses, les valeurs morals et politiques, le vocabulaire, les rituels, les sociabilités, les trajectoires individuelles de ce parti tout entier organisé autour de son journal, Egalité-La République algérienne, pour révéler l'épaisseur humaine d'une structure partisane.
On découvre un militantisme plus actif et frondeur dans certaines sections que dans d'autres, des affinités avec l'Association des 'Ulama parfois si puissantes que les deux organisations se confondent localement. L'on comprend surtout que, durant cette décennie où se concurrencent UDMA, PPA-MTLD, 'Ulama, et PCA- période durant laquelle la pluralité est constamment mise en tension avec le désir d'union des indépendistes -, se jouent des questions aussi décisives que la définition de soi et l'imagination du système politique à venir.
Ainsi, au-delà du rôle majeur de l'UDMA, Malika Rahal analyse ce moment de l'histoire où le parti politique fut la forme privilégiée de l'action collective : de 1946 à 1956, les Algériens expérimentent dix années de stratégies et de débats politiques, de discussions autour du statut de la religion, de la conception de la nation et du futur Etat indépendant. Expérience inédite dont il est impératif et salutaire de se souvenir aujourd'hui.